Les fiancés de l’hiver de Christelle Dabos

Quelle idée saugrenue que le mariage. Et en cela, Ophélie porte autant d’intérêt à la question qu’un nain pour les légumes verts. Comme son vieil oncle, elle n’a d’yeux que pour les reliques d’avant la Déchirure, qu’elle collectionne dans son musée. Les objets qu’elle lit lui chuchotent leurs histoires, lui délivrent leurs pensées, toutes leurs pleines émotions. Ils sont bien plus bavards et intéressants que son futur époux, dont le visage glacial reflète l’arche lointaine dont il provient. Alors pourquoi elle ? Et si tout cela avait un quelconque lien avec son don pour lire les objets anciens ? Découvrez ci-dessous l’avis de lecture sur Les fiancés de l’hiver de Christelle Dabos.

 

Note : ⭐️⭐️⭐️⭐️⭐️ / 5
Genre : Young Adult
Cycle : La Passe-Miroir
Nombre : Livre 1
Auteur : Christelle Dabos
Edition : Gallimard Jeunesse
Couverture : Laurent Gapaillard
Nombre de pages : 567 pages

 

Résumé :
Sous ses lunettes de myope, Ophélie cache des dons singuliers : elle peut lire le passé des objets et traverser les miroirs. Quand on la fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons, la jeune fille doit quitter sa famille et le suivre à la Citacielle, capitale flottante du Pôle. À quelle fin a-t-elle été choisie ? Sans le savoir, Ophélie devient le jouet d’un complot mortel.

 

Thèmes :

Héroïne

Héroïne

Pouvoir magique

Pouvoir magique

Intrigue

Intrigue

Cité

Cité

 


Menaces constantes

Après avoir refusé les demandes en mariage de nombreux et lointains cousins, Ophélie voit ses habitudes bousculées le jour où les doyennes d’Anima concluent une alliance avec une famille issue d’une arche lointaine, dont elle est bien malgré elle le cadeau. Malheureusement, elles ne pouvaient pas choisir un lieu plus froid, plus effrayant et plus dangereux que l’arche du Pôle.

Accompagnée de sa marraine Roseline, de ses bagages et d’une écharpe qui s’apparente à un véritable animal de compagnie, la jeune passe-miroir s’envole à bord un aérostat destination les contrées sauvages, où l’on dit que les animaux sauvages sont d’une taille démesurée, que leurs hommes tatoués sont aussi austères que grands. Et il faut dire qu’en la matière, son futur fiancé peu loquace s’évertue à appliquer ces « on-dit » à la lettre. Le peu de mots qui sortent de sa bouche sonne comme une sombre prédiction. Il vaudrait mieux qu’elle renonce dès maintenant. Elle ne survivra pas là-bas. Tout le monde déteste l’intendant de la cité, ils chercheront à lui nuire, à la blesser, voire même à la tuer.

D’ailleurs, leur entrée en catimi chez sa tante au bout milieu de la nuit et la mise en garde du fiancé de ne pas mettre le nez dehors ne la rassure pas vraiment. Alors que le mariage n’est prévu que dans plusieurs mois, la tante Berenilde tente de l’initier aux us et coutume de la cité flottante. Mais c’était sans compter sur Le Seigneur Farouk, esprit de famille et grand manitou du Pôle, qui autorise Berenilde et les siens à revenir à la cour, sous la protection de l’ambassadeur Archibald.

Afin de protéger la vie et l’identité de la future mariée, celle-ci se déguise en valet et se cache pour échapper aux menaces, car à la cour, tout n’est qu’illusion, manipulation et intrigue. Elle découvrira néanmoins grâce à elles les raisons qui l’ont emmené ici et le vrai visage de Thorn.

 

Bienvenue à la cour des excès et du vice

Comme Ophélie, j’ai découvert à travers les yeux de Mime, une cour d’excès et de vices (coucou Louis XIV !) où la réputation et les faux-semblants sont rois, et où de puissantes familles rivales tentent d’acheter les faveurs de Farouk. Ce géant blanc aux humeurs changeantes peut vous apporter la gloire d’un claquement de doigt, comme vous bannir de la Citacielle si votre trogne ne lui revient pas. Vous aussi, vous trépignez d’impatience tout autant que moi de le rencontrer ? Les esprits de famille, au nom de dieu issu de la mythologie, semblent des êtres tout à fait singuliers. Leur immortalité leur permettent de léguer à leurs descendants leur don magique qui peut aller de la télépathie aux créations / annulations d’illusions, en passant par une mémoire ancestrale.

Quant au décor, que dire ? L’auteure image avec l’aide de descriptions concises et efficaces, les différents environnements de la cité flottante, évoquant tantôt une cour artificielle dont le décor n’est qu’illusions, tantôt des niveaux inférieurs industriels (aérogare, machinerie, ascenseur) bien précaires.

D’ailleurs, vous sentirez immédiatement que la jeune héroïne n’est pas vraiment à sa place, dans l’un comme dans l’autre. Innocente, maladroite, provinciale, perpétuellement enrhumée, sortant d’un guêpier pour tomber dans un autre, nous voyons combien le chemin sera long pour elle avant d’être acceptée par sa belle-famille. Elle montre néanmoins beaucoup de courage dans ses mésaventures et de la bienveillance envers les sans-pouvoirs.

Quant aux autres personnages, leur nombre réduit a l’avantage d’aider le lecteur à rapidement cerner la personnalité de chacun, de les apprécier ou de les détester. Avec Thorn, nous passons de l’un à l’autre. Ses manières protocolaires, ses tics obsessionnels, cette habitude de tout dissimuler pour protéger les siens vous agacera comme il vous séduira. Quant à la tante Berenilde, la figure féminine du récit, ses caprices mettront plus d’une fois la jeune fille en difficultés.

 

« La cour ! souffla Roseline en grattant le papier de sa plume. Un bien joli mot pour désigner une grotesque scène de théâtre où les coups de poignard se distribuent dans les coulisses. Quitte à choisir, je crois que nous sommes mieux ici, bien à l’abri de ces toqués. »

 

La femme : le sexe faible de l’histoire ?

Et ces scènes m’ont mis mal à l’aise. Même s’il est destiné à un jeune public par sa féerie et sa lecture accessible, certaines scènes ou dialogues ne sont clairement pas adaptés. Les relations des deux femmes se compliquent au fur et à mesure de la lecture. Ophélie apparaît alors totalement soumise, maltraitée (verbalement et physiquement). Ce que l’on attend d’elle ? Pas grand chose. Ah si, porter un héritier et ce mariage, qui seront tous deux le fruit d’une alliance politique entre les deux arches.

Alors que la jeune fille envisage d’expertiser des objets, Thorn la coupe immédiatement dans son élan. Archibald, de son côté, lui confie qu’il envisage sans honte de déflorer la fiancée de l’intendant lorsqu’elle arrivera, voyant en cela un jeu, une chasse. Cela touche tous les personnages féminins. La tante Berenilde devient grotesque à force d’essayer d’être de nouveau la favorite de Farouk.

 

Le mot de la fin

Alors je vous le dis, le mariage n’est pas toujours le mélange d’amour et de sincérité auquel les contes nous ont habitués. Il peut être en revanche la première pierre d’une confiance mutuelle. Ce premier livre de la Passe-Miroir, Les fiancés de l’hiver de Christelle Dabos, m’a séduit pour ses intrigues, ses nombreux méchants, et les scènes d’actions qui se succèdent facilement. Si le récit manque de profondeur sur la durée, les péripéties de la jeune fille nous permettent d’entrer pleinement dans l’univers de l’auteure, nous invitant à poursuivre avec le second tome : Les disparus du Clairdelune.

 

Citations Les fiancés de l’hiver de Christelle Dabos

« Oublier les morts, c’était comme les tuer une seconde fois »

 

« — Que faites-vous ainsi ? demanda Berenilde à Archibald.
Assis la tête en bas dans son fauteuil, il décrocha son narguilé de ses lèvres et souffla un ruban de fumée bleue. Son vieux haut-de-forme était tombé et ses cheveux pâles s’écoulaient jusque sur le tapis.
— J’observe mon existence sous un angle différent, déclara-t-il gravement.
— Voyez-vous cela ! Et qu’en déduisez-vous ?
— Qu’à l’endroit ou à l’envers, elle est absolument vide de sens. »

 

« La cour ! souffla Roseline en grattant le papier de sa plume. Un bien joli mot pour désigner une grotesque scène de théâtre où les coups de poignard se distribuent dans les coulisses. Quitte à choisir, je crois que nous sommes mieux ici, bien à l’abri de ces toqués ».

 

« Un mort, ce n’était pas seulement la perte d’un être cher. C’était une part entière de soi qui disparaissait dans le néant. »

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